Madame la Députée, Monsieur le Député,
Vous devez bientôt vous prononcer sur la proposition de loi Garot.
Je me permets de vous alerter solennellement sur les conséquences néfastes de ce texte, et de vous inviter à y opposer votre vote.
Ne découragez pas les jeunes qui voient le métier de médecin comme une vocation et un ascenseur social.
Cette proposition de loi repose sur un diagnostic erroné. Ce n’est pas la liberté d’installation qui met en péril l’accès aux soins, mais bien la pénurie structurelle de médecins, résultat du numerus clausus imposé par le législateur dans les années 80 et jusqu’en 2020 mais aussi du manque d’attractivité de l’exercice libéral.
Les besoins de santé ont changé et des générations de praticiens partent massivement à la retraite.
Il est illusoire de penser que des mesures coercitives vont résoudre cette crise.
Ce texte aligne une série de contraintes supplémentaires sous couvert d’égalité territoriale : suppression de la liberté d’installation, restrictions des remplacements, obligations de gardes, etc.
Ces mesures envoient un message décourageant supplémentaire à la génération qui va vous soigner demain, et qui a pourtant choisi ce métier au prix d’un engagement long, exigeant et le plus souvent, plein de sacrifices.
Les jeunes médecins sont volontaires pour bien soigner la population, ils rencontrent des difficultés matérielles et organisationnelles majeures mais persévèrent dans leur devoir. Ils ont besoin d’une main tendue, pas de mesures coercitives.
Cette proposition de loi risque aussi d’aggraver la situation préoccupante de l’accès aux soins dans certaines régions en y interdisant l’installation de nouveaux diplômés. Surtout, elle passe à côté de l’essentiel : la qualité du soin et de la relation thérapeutique, qui ne se régulent pas par décret.
Notre syndicat Jeunes Médecins participe à l’effort collectif pour trouver des solutions et demande à être associé aux politiques publiques de santé. Tous les jeunes médecins ne veulent pas être désignés comme responsables d’un échec collectif.
Nous avons déjà soumis 23 propositions concrètes basées sur le volontariat des jeunes médecins que vous retrouverez sur notre site internet.
Certaines d’entre elles ont intéressé le Premier Ministre car elles ont vocation à améliorer l’accès aux soins sans sacrifier la confiance ni la motivation : o Faciliter l’exercice multi-sites, o Créer des centres & unités mobiles pluridisciplinaires dans les zones sous-dotées, avec un roulement volontaire de professionnels de toute la région, o Aider les médecins à s’installer au sein d’équipes pluridisciplinaires dans les zones en tension.
Pour retrouver ces 23 mesures : jeunesmedecins.fr
Nous voulons éviter que se développe un climat de défiance envers les médecins, qui fragilise davantage l’attractivité des métiers du soin et leur exercice quotidien.
Madame la Députée, Monsieur le Député, il ne s’agit pas de défendre des privilèges.
Rappelez-vous que le salaire horaire des médecins débutants (6,59 €/h pour une semaine de 48h) n’est pas en corrélation avec la responsabilité et la prise de risque du diagnostic du jeune praticien.
Je me permets de vous rappeler ce chiffre alarmant : un interne se suicide tous les 18 jours.
Il s’agit de préserver ce qui fait la force de notre système de santé : la confiance, l’engagement, la liberté et le sens. La coercition n’apportera jamais de solution durable. Elle ne crée pas de vocation mais elle les éteindra.
La commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale a écarté la mesure phare de cette proposition de loi. Nous vous encourageons à votre tour à refuser la coercition au profit de la responsabilité partagée en votant contre cette PPL Garot les 6 et 7 mai prochain.
Préférez le dialogue et la création d’une politique de santé digne des enjeux du XXIe siècle !
Je vous prie de croire, Madame la Députée, Monsieur le Député, en l’expression de mes salutations respectueuses, Dre Anna Boctor Médecin pédiatre libérale, présidente de Jeunes Médecins
|